Depuis 1992, les électeurs d’une collectivité territoriale peuvent être consultés sur les décisions que celle-ci envisage de prendre pour régler les affaires relevant de sa compétence (art. L.1112-15 et suivants du CGCT).
Cette consultation, qui ne doit pas être confondue avec le référendum local, peut être limitée aux électeurs d’une partie du ressort de la collectivité dès lors que l’objet de la consultation ne concerne qu’une partie de la collectivité.
Initiative et objet de la consultation
En pratique, la décision de recourir à une consultation peut être adoptée :
– soit par l’organe délibérant de la collectivité ;
– soit à l’initiative des électeurs eux mêmes.
Peuvent ainsi demander à ce que soit inscrite à l’ordre du jour de l’assemblée délibérante de la collectivité l’organisation d’une consultation sur toute affaire relevant de la décision de cette assemblée :
– dans une commune, un cinquième des électeurs inscrits sur les listes électorales ;
– dans les autres collectivités territoriales, un dixième des électeurs,
Toute consultation menée par une commune doit relever sur une affaire relevant de sa compétence
L’objet de la consultation menée par une commune doit porter sur une affaire relevant de sa compétence. Autrement dit, lorsqu’une consultation des électeurs porte sur un sujet ne relevant pas de la compétence de la collectivité, la délibération approuvant son principe et sa mise en œuvre est susceptible d’être annulée par le juge administratif.
A titre d’exemples, ont été considérées comme ne relevant pas des compétences communales des consultations portant sur :
– la traversée de la commune par une autoroute (CE, 16 décembre 1994, Commune d’Avrillé) ;
– le projet de tracé d’une ligne de TGV (CE, 14 avril 1995, Commune de Vertaben) ;
– le droit de vote et l’éligibilité des résidents étrangers aux élections locales (TA Cergy Pontoise, 23 février 2006, Préfet de la Seine-Saint-Denis) ;
– le maintien sur le territoire de personnes étrangères (CE, 16 novembre 1994, Commune d’Awala-Yalimapo) ;
– la référence à un « seuil de tolérance en matière d’immigration » dans le cadre de l’attribution de logements HLM (CE, 21 juin 2000, Commune de Charvieu-Chavagneux).
A l’inverse, des consultations locales ont pu valablement être organisées (période 2008-2009) sur des thèmes aussi variés que :
– l’implantation d’un commerce (commune de Grignan, dans la Drôme) ;
– le choix architectural d’un château d’eau (commune de Saint-Lys, en Haute-Garonne) ;
– l’exploitation d’une gravière ( comme de Fraimbois, en Meurthe-et-Moselle) ;
– l’implantation d’éoliennes (commune de Domptail-en-l’Air et Haussonville, Meurthe-et-Moselle) ;
– un projet d’assainissement (commune de Clos-Fontaine, Seine-et-Marne).
Organisation et financement du scrutin
Dans l’année, un électeur ne peut signer qu’une seule demande tendant à l’organisation d’une consultation par une même collectivité territoriale. La décision d’organiser la consultation appartient à l’assemblée délibérante de la collectivité territoriale.
L’assemblée délibérante de la collectivité territoriale arrête le principe et les modalités d’organisation de la consultation. Sa délibération indique expressément que cette consultation n’est qu’une demande d’avis. Elle fixe le jour du scrutin et convoque les électeurs.
A l’instar du référendum local, le recours à la procédure de la consultation est assorti d’un contrôle renforcé du représentant de l’Etat. La délibération de la collectivité fixant les modalités d’organisation de la consultation est transmise deux mois au moins avant la date du scrutin au représentant de l’Etat. Si celui-ci l’estime illégale, il dispose d’un délai de 10 jours à compter de sa réception pour la déférer au tribunal administratif. Il peut assortir son recours d’une demande de suspension.
Le président du tribunal administratif ou le magistrat délégué par lui statue dans un délai d’un mois, en premier et dernier ressort, sur la demande de suspension. Il est fait droit à cette demande si l’un des moyens invoqués paraît, en l’état de l’instruction, propre à créer un doute sérieux quant à la légalité du projet soumis à consultation (par exemple, si la question soumise ne relève pas de la compétence de la collectivité). Lorsque la délibération organisant la consultation est de nature à compromettre l’exercice d’une liberté publique ou individuelle, le président du tribunal administratif ou le magistrat délégué par lui en prononce la suspension dans les 48 heures. Si la délibération émane de l’assemblée délibérante d’une collectivité territoriale autre que la commune, le représentant de l’Etat dans cette collectivité la notifie dans un délai de quinze jours aux maires des communes dans lesquelles la consultation est prévue, sauf s’il a été fait droit à sa demande de suspension.
Les maires organisent le scrutin. Si un maire refuse de procéder à cette organisation, le représentant de l’Etat, après l’en avoir requis, y procède d’office.
Si le maire refuse d’organiser une consultation, le représentant de l’Etat peut y procéder d’office
Côté financement, les dépenses liées à l’organisation de la consultation des électeurs constituent une dépense obligatoire de la collectivité territoriale qui l’a décidée.
Les dépenses résultant des assemblées électorales tenues dans les communes pour l’organisation d’une consultation décidée par une autre collectivité territoriale leur sont remboursées par cette collectivité de manière forfaitaire, au moyen d’une dotation calculée en fonction du nombre des électeurs inscrits dans la commune et du nombre des bureaux de vote qui y sont installés.
Limites du dispositif
Outre le fait que la consultation des électeurs ne peut porter que sur une affaire relevant de la compétence de la collectivité, l’organisation d’une consultation est soumise aux contraintes du calendrier électoral. Ainsi, aucune consultation ne peut être organisée par une collectivité territoriale après le premier jour du sixième mois précédant celui au cours duquel il doit être procédé au renouvellement général ou au renouvellement d’une série sortante des membres de son organe délibérant. De la même façon, aucune consultation ne peut intervenir durant les campagnes ou les jours de scrutin de diverses élections ou consultations. En outre, pendant un délai d’un an à compter de la tenue d’une consultation à l’initiative d’une collectivité territoriale, celle-ci ne pourra recourir à un autre referendum portant sur le même objet.
Enfin, l’une des principales limites de cet outil résulte de sa portée. Selon la jurisprudence, en effet, les résultats de la consultation n’expriment qu’un simple avis qui, ne liant pas l’autorité municipale, n’est pas une « décision faisant grief » (CAA Paris, 22 février 2005, Association Les amis de la terre du Val d’Ysieux). L’exemple du projet de tramway à Caen illustre assez bien les limites de cet outil. Ainsi, après avoir été rejeté les deux-tiers des votants dans le cadre d’une consultation locale en 1996 (à peine 20 % des électeurs seulement s’étant déplacés), le projet de tramway caennais verra finalement le jour quelques années plus tard… Certes, en 2001, lors des élections municipales suivantes, le maire sortant ne sera pas réélu…
C.R.