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Les délégations de service public

Les délégations de service public (DSP) constituent, avec les marchés publics, les principaux modes de relations contractuelles entre les collectivités locales et les prestataires extérieurs. Elles s’en distinguent toutefois sur plusieurs aspects.


Définition

 

Les conventions de délégation de service public ont été définies par la loi n° 2001-1168 du 11 décembre 2001, dite loi « MURCEF », modifiant la loi n° 93-122 du 29 janvier 1993, dite loi « Sapin ».


La délégation de service public est ainsi définie comme « un contrat par lequel une personne morale de droit public confie la gestion d’un service public dont elle a la responsabilité à un délégataire public ou privé, dont la rémunération est substantiellement liée au résultat de l’exploitation du service. Le délégataire peut être chargé de construire des ouvrages ou d’acquérir des biens nécessaires au service ».


Caractéristiques

 

Une délégation de service public a pour objet de confier au cocontractant (le délégataire) de l’administration (l’autorité délégante) la charge d’assurer en tout ou partie l’exécution d’un service public.


En pratique, une convention de délégation de service public est caractérisée par plusieurs critères :


la nature de service public de l’activité déléguée. Le Conseil d’Etat a été amené à plusieurs reprises à s’interroger sur la nature de service public de l’activité déléguée (1) ;


le caractère délégable du service public. Certaines activités ne peuvent pas être déléguées. Il en va ainsi par exemple des tâches de police (2), de la prévention des maladies infantiles (3) ou encore de la surveillance des élèves (4)….


l’existence d’un lien de délégation entre la personne publique chargée d’un service public et la personne à laquelle elle confie la gestion de ce service ;


le mode de rémunération prévu par le contrat : le délégataire d’un service public reçoit une rémunération, dont le montant est lié au résultat de l’exploitation du service, laquelle peut-être, mais pas exclusivement, la redevance payée par les usagers.


Différence entre un marché public et une délégation de service public

 

La différence fondamentale entre un marché public et une délégation de service public résulte du mode de rémunération retenu :


– dans le cadre d’un marché public, le paiement est intégral et immédiat et effectué par l’acheteur public.


– s’agissant d’une délégation de service public, en revanche, la rémunération est tirée principalement de l’exploitation du service.


Depuis 1993, ce critère essentiel de distinction a été peu à peu précisé par la jurisprudence du Conseil d’Etat. Ainsi, dans un arrêt de 1996 (5), la Haute Juridiction administrative a considéré que devaient être qualifiés de contrats de délégation de service public les contrats dans lesquels la rémunération du cocontractant de l’administration est substantiellement assurée par les résultats de l’exploitation. La liaison de la rémunération, pour une part substantielle (30 %), qui peut ne pas être majoritaire (6), aux résultats de l’exploitation, entraîne donc l’assujettissement du contrat aux règles édictées par la loi « Sapin ». Autrement dit, des conventions conclues par une collectivité peuvent se voir attribuer le caractère de délégation, quand bien même aucune redevance ne serait perçue par l’exploitant auprès des usagers (par exemple, les usines d’incinération d’ordures ménagères avec la revente de chaleur à des industriels).

 

Mise en concurrence

 

A l’instar des marchés publics, les délégations de service public sont soumises à publicité et mise en concurrence dont les modalités ont été prévues par la loi « Sapin » du 29 janvier 1993.


En outre, pour permettre à la concurrence de s’exercer, les conventions de délégation de service public doivent être limitées dans leur durée.


Ainsi, la loi du 29 janvier 1993 dispose que les délégations de service public doivent avoir une durée limitée « en fonction des prestations demandées au délégataire » et compte tenu de la durée normale des investissements à sa charge.


A titre d’exemple, la loi sur la protection de l’environnement du 2 février 1995, prévoit que la durée des délégations de service public dans « le domaine de l’eau potable, de l’assainissement, des ordures ménagères et autres déchets » ne doit pas excéder une durée de 20 ans.


La prolongation d’une telle délégation ne demeure possible que pour motif d’intérêt général ou en raison de l’exécution de travaux ou d’investissements à amortir.


Droit à l’information de la personne publique

 

La loi du 8 février 1995 a également introduit l’obligation pour le délégataire de produire un rapport annuel sur les comptes et la qualité du service dont il a en charge l’exploitation. Ce droit à l’information de l’autorité délégante pesant sur le délégataire contribue au renforcement de l’information et de la transparence. Le rapport annuel doit être remis par le délégataire à l’autorité délégante avant le 1er juin. Dès sa communication, son examen est mis à l’ordre du jour « de la plus prochaine réunion de l’assemblée délibérante qui en prend acte » (7). Un décret du 14 mars 2005 (8) a précisé le contenu du rapport annuel du délégataire de service public local. Ce dernier comprend des données comptables, une analyse de la qualité du service ainsi qu’une annexe.


Données comptables


Au titre des données comptables, le rapport annuel doit comprendre,
le compte annuel de résultat – de l’exploitation de la délégation ;
– une présentation des méthodes et des éléments de calcul économique ;
– un état des variations du patrimoine immobilier ;
– un compte-rendu des biens et immobilisations nécessaires à l’exploitation du service public ;
– un état de suivi du programme contractuel ;
– un état des autres dépenses de renouvellement ;
– un inventaire des biens désignés au contrats comme biens de retour ;
– les engagements à incidence financière.


Analyse de la qualité du service


L’analyse de la qualité du service comporte tout élément permettant d’apprécier la qualité du service rendu et les mesures proposées par le délégataire pour une meilleure satisfaction des usagers. Dans ce cadre, la qualité du service est notamment appréciée à partir d’indicateurs proposés par le délégataire ou demandés par le délégant et définis par voie contractuelle.


Annexe


L’annexe comporte un compte rendu technique et financier comportant les informations utiles relatives à l’exécution du service et, notamment :
– les tarifs pratiqués ;
– leur mode de détermination et leur évolution ;
– les autres recettes d’exploitation.


Ce pouvoir de contrôle de l’autorité délégante sur le délégataire de service public tend aujourd’hui à se renforcer avec la mise en place d’indicateurs de performance destinés à permettre de mieux évaluer les conditions d’exercice de la délégation.


Les différents modes de gestion des services publics

 

En pratique, les modes de gestion des services publics peuvent revêtir différentes formes. On distingue ainsi la régie, le contrat de concession, le contrat d’affermage, la convention de régie intéressée ou encore la convention de gérance.


La régie


La régie consiste en la prise en charge directe du service public par la collectivité publique elle-même, au point que l’on a parfois pu définir celui-ci comme un « service public personnalisé ».


La concession de service public


Dans le cadre d’une concession de service public, une personne publique (autorité concédante) confie, par contrat et pour une durée déterminée, l’exécution d’un service public à un tiers, une personne privée ou personne publique (le concessionnaire). Le concessionnaire doit mettre en place l’ensemble des installations, des équipements nécessaires à l’exploitation du service public (par exemple un réseau de distribution d’eau). La rémunération du concessionnaire est assurée par la perception d’une redevance auprès des usagers, étant entendu que le concessionnaire assume les pertes liées à l’activité. A l’issue du contrat de concession, tout revient à la personne publique.


Le contrat d’affermage


Dans le cadre de l’affermage, le fermier ne construit pas les installations du service, ces dernières étant mises à sa disposition par la personne publique qui afferme. Le fermier reverse une partie « location » au titre des installations qu’il utilise.


La convention de régie intéressée


Dans la convention de régie intéressée, le régisseur gère le service pour le compte de la personne publique délégante dont il est, en quelque sorte, le mandataire. Le régisseur est rémunéré par la personne publique en fonction des résultats du service.


La convention de gérance


La convention de gérance est très proche de la convention de régie intéressée, si ce n’est que la rémunération du gérant est fixée de manière forfaitaire. Pour la jurisprudence, compte tenu de ses caractéristiques, ce type de contrat constitue un marché public (9).


Les autres contrats


Parmi les autres contrats figurent tous ceux qui n’entrent pas dans les catégories précédentes. Peuvent être notamment cités les baux emphytéotiques, les conventions d’occupation domaniale ou encore les partenariats public-privé (PPP).

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Notes

(1) Conseil d’Etat, Avis du 24 mars 1995
(2) Conseil d’Etat, Ville de Menton, 1994
(3) Conseil d’Etat, Syndicat des psychiatres français, 1989
(4) Conseil d’Etat, Avis du 7 octobre 1986
(5) Conseil d’Etat, 15 avril 1996, Préfet des Bouches du Rhône c/ Commune de Lambesc
(6) Conseil d’Etat, 30 juin 1999, SMITOM Centre ouest Seine et Marnais
(7) Article L. 1411-3 du Code général des collectivités territoriales
(8) Articles R. 1411-7 et R. 1411-8 du Code général des collectivités territoriales
(9) Conseil d’Etat, 7 avril 1998, Commune de Guiherand-Granges

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