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Urbanisme : précisions sur le droit de préemption

Le prix proposé dans le cadre d’une préemption peut-il affecter la légalité de cette dernière ? C’est par la négative que vient de répondre à cette question le Conseil d’Etat dans un arrêt du 7 janvier 2013.


Dans cette affaire, le juge du tribunal administratif de Montreuil avait suspendu l’exécution d’une décision d’exercice de son droit de préemption urbain par le maire de Montreuil. Le vendeur de l’immeuble objet de la préemption avait en effet formé une requête en référé sur le fondement de l’article L. 521-1 du Code de justice administrative. Cet article dispose que le juge des référés, saisi d’une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l’exécution d’une décision administrative qui fait par ailleurs l’objet d’un recours en annulation ou en réformation, lorsque l’urgence le justifie et qu’il est fait état d’un moyen propre à créer, en l’état de l’instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision. Pour fonder sa décision de suspendre l’arrêté de préemption, le juge des référés avait considéré que, non seulement la décision de préemption était insuffisamment motivée, mais encore que le prix proposé par la commune était si éloigné du prix figurant dans la déclaration d’intention d’aliéner qu’il permettait légitimement de douter de la légalité de la préemption exercée.

Le prix proposé par la collectivité est « par lui-même sans incidence » sur la légalité de la décision de préempter


Saisi d’un recours contre cette mesure, le Conseil d’Etat confirme que la décision de préemption était insuffisamment motivée et qu’à ce seul titre, elle justifiait la suspension ordonnée en référé. Toutefois, la Haute juridiction administrative considère que le prix proposé par la collectivité est « par lui-même sans incidence » sur la légalité de la décision de préempter. Certes, il peut constituer un élément permettant d’apprécier si la préemption répond bien à l’une des finalités listées à l’article L. 300-1 du Code de l’urbanisme et/ou à un intérêt général suffisant. Mais ce caractère excessif ou insuffisant du prix ne peut être qu’un indice. Il est heureux que le juge administratif ait statué en ce sens car cela permet aux communes de pouvoir « discuter » le prix proposé par le vendeur dans le cadre de l’exercice de leur droit de préemption. Le maire (ou le conseil municipal lorsqu’il a conservé la compétence correspondante) doit pouvoir ici agir « en bon père de famille » ou du moins dans le respect d’une saine gestion des deniers publics qui lui sont confiés, quels que soient par ailleurs les projets portés par la collectivité et que l’exercice de la préemption va permettre de réaliser. Cela est d’autant plus vrai qu’en tout état de cause, le Code de l’urbanisme met en œuvre une procédure protectrice de la propriété privée : lorsqu’il y a discussion – c’est-à-dire désaccord – sur le prix, le vendeur peut toujours revenir sur sa décision de vendre, voire imposer à la collectivité de faire appel au juge judiciaire compétent pour fixer le montant de la somme qui sera finalement allouée au vendeur du bien préempté.


E.S.


Source : CE, 7 janvier 2013, « Sieur A… c/ commune de Montreuil », n° 357230

  Voir l’arrêt du Conseil d’Etat

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